Patrimoine : Noël et Roger, pêcheurs, perpétuent la tradition

Fos-sur-Mer dispose de nombreux coins de pêche. L’un d’eux, plus confidentiel, est pratiqué sur l’étang de l’Estomac. Ils sont trois à y relever leur trabaque

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“Voilà, c’est notre coin de pêche” , Noël Marrau fait face à l’étang de l’Estomac. À ses côtés, Roger Donnet. Tous deux sont amis et adeptes de la pêche. Pas n’importe laquelle, une pêche traditionnelle, celle qu’ils ont vue pratiquer, alors gamins, par leurs grands-pères, leurs pères et leurs oncles: ” Ils étaient une quinzaine, se souvient Noël. Ils avaient une barque en commun. On voit encore les piquets plantés dans l’eau et les pierres du petit port. On calait des trabaques, des filets en forme d’entonnoir attachés sur la rive. On attendait quelques jours et quand on revenait, il y avait des poissons piégés. » Roger nuance : « Oui, sauf quand un cormoran faisait un trou dans le filet. Ça leur laissait une chance de revenir la fois d’après. » Il est un peu bizarre cet étang, car selon Noël: “Des fois, le filet est tellement plein qu’on a du mal à le remonter à bord de la barque et d’autres fois, il y a deux favouilles.” Il se souvient aussi que, à l’époque, lorsqu’il y avait trop de poissons, les pêcheurs les mettaient dans une bourriche en filet, plongée dans l’eau : “Oui, on ne prenait pas tout. On laissait les poissons dont on n’avait pas besoin. Les gens se servaient.”

Avec le fils de Noël, Nicolas, ils sont trois à bénéficier d’une autorisation, délivrée par la Police municipale: “On a le droit à un filet par personne”, tient à préciser Roger qui ajoute: “La pêche, c’est une tradition pour les Fosséens et c’est un droit! Depuis le 16e siècle. Ce sont les Porcelet qui ont autorisé les Fosséens à pêcher dans l’étang.” Si, au siècle passé, elle pouvait se pratiquer sur toute la lagune, elle est désormais réglementée. C’est dans la partie nord (côté est), que la pêche est autorisée afin ne pas empiéter sur le territoire consacré aux activités nautiques. La Municipalité a construit une rampe, afin de faciliter la mise à l’eau de leur barque. Quand ils embarquent pour récupérer le poisson, c’est Noël qui rame et Roger qui tire sur le filet. Alors, que pêche-t-on dans l’Estomac? : « Des anguilles, des cabassons, des muges, des gobies, quelques loups, des favouilles … Énumère Noël. Le gobie, c’est pour la soupe ! » Soupe que madame Marrau prépare avec soin. Pour Roger: “L’anguille, c’est bon en blanquette, avec des tomates et des câpres. » Au-delà de ramener du poisson à la maison et de perpétuer la tradition, c’est un moment de détente pour eux. C’est un bel endroit, d’où l’on peut contempler le château de l’Hauture et l’église Saint-Sauveur. La rive est couverte de joncs maritimes. Il y a certes des moustiques, mais les deux hommes ne les craignent pas. On entend, au loin, dans un petit marais, des crapauds coasser. Une aigrette, bel oiseau blanc, ébouriffe son plumage à quelques mètres d’eux : « Ça nous fait prendre l’air », résume Noël. Roger acquiesce, en souriant à son ami : « Où tu veux être mieux qu’ici ?»

Le mot de l’élu Philippe Troussier, adjoint à l’environnement et à l’urbanisme.

“Tout en étant très réglementé afin de protéger ce patrimoine naturel unique, je suis heureux que la pêche dans l’étang de l’Estomac perdure aujourd’hui encore. L’amélioration de la mise à l’eau était pour moi très importante , afin de maintenir cette tradition. Mon ambition était de permettre à Noël et Roger de retrouver leur petit coin de pêche. Je me rappelle, plus jeune, avoir accompagné Bebert Garel pour une séance de pêche inoubliable et une soupe aux crabes partagée ensemble dans son cabanon. Cette pêche traditionnelle fait partie intégrante de notre histoire fosséenne, elle fait partie de la protection que nous apportons à nos étangs. Voilà qui est concret et bien loin des incantations de mauvaise foi de certains.”